Texte description de la rubrique 1.Et quoniam mirari posse quosdam peregrinos existimo haec lecturos forsitan, si contigerit, quamobrem cum oratio ad ea monstranda deflexerit quae Romae gererentur, nihil praeter seditiones narratur et tabernas et vilitates harum similis alias, summatim causas perstringam nusquam a veritate sponte propria digressurus.

Diffamation & injure : l'indispensable assistance d'un avocat

La diffamation et l'injure sont des délits dit "de presse" car il ne s'agit pas de délits "classiques" (c'est-à-dire de droit commun) mais de délits prévus et réprimés dans une loi spéciale, la fameuse loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Cette loi n'est pas applicable qu'aux médias mais à toute personne car il s'agit notamment d'encadrer les limites à la liberté d'expression. Toutefois, la liberté d'expression étant un droit fondamental, ces limites sont strictes et encadrées par des règles rigoureuses. Cette rigueur rend l'assistance d'un avocat indispensable, tant pour se plaindre d'une personne pour diffamation ou injure que pour se défendre d'une accusation de diffamation ou injure. Cet article a pour but d'illustrer le nécessité de recourir à un avocat avec deux exemples de décisions obtenues par le cabinet.

1. Jugement du tribunal correctionnel d'Angers du 13 décembre 2021 (minute n°1542/2021 - parquet n°19-339-68)

Le cabinet a obtenu la nullité de la plainte avec constitution de partie civile du plaignant pour diffamation (pourtant rédigée par un avocat) en raison du défaut de mention de l'article 32 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. En conséquence, la prévenue a été relaxée.

En effet, l’article 50 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose que :

« Si le ministère public requiert une information, il sera tenu, dans son réquisitoire, d'articuler et de qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels la poursuite est intentée, avec indication des textes dont l'application est demandée, à peine de nullité du réquisitoire de ladite poursuite.»

Le but de cette règle est de permettre à la personne mise en cause de connaître, dès l'engagement des poursuites et sans équivoque, la nature et l'étendue de celles-ci, pour la mettre ainsi en mesure de préparer utilement sa défense. Si la règle vise littéralement le réquisitoire, elle s'applique en réalité au bloc procédural plainte avec constitution de partie civile / réquisitoire introductif.[1]

Ce texte emporte trois exigences cumulatives :

  • Articulation des faits ;
  • Qualification des faits ;
  • Indication des textes dont l’application est requise.

Dans cette affaire, c’est la troisième exigence qui fait défaut au sein de la plainte avec constitution de partie civile à défaut de mention du premier alinéa de l’article 32 de la loi du 29 juillet 1881 réprimant la diffamation, seul l’article 29 définissant la diffamation étant indiqué et reproduit.

Cette nullité est d'ailleur d'ordre publique et doit être prononcée d’office, mais encore faut-il que quelqu'un la souligne...

2. Arrêt de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel d'Angers du 3 mai 2022 (arrêt n°289 - parquet général n°21/00143)

Le cabinet a obtenu dans cette affaire plusieurs succès :

  • Succès de forme : nullité de deux plaintes avec constitutions de parties civiles, de deux réquisitoires introductifs et, s'agissant de ces deux plaintes, de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et des citations devant le tribunal et la cour d'appel, ainsi que la constatation de la prescirption concernant ces deux plaintes et donc la relaxe du prévenu
  • Succès de fond : relaxe du prévenu concernant une troisième plainte
  • Succès financier : Condamnation des trois plaignants à régler au prévenu la somme de 652,80 € en application de l'article 800-2 du code de procédure pénale (il s'agit des frais de défense, toutefois plafonnés au barème de l'aide juridictionnelle)

S'agissant des plaintes qui ont été annulées, encore une fois, les plaintes avaient été rédigées par un avocat, mais elles comportaient un vice de forme car elles visaient l'infraction de diffamation envers un agent public travaillant pour le compte d'une collectivité territoriale, qualité non prévue par l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

En effet, selon l’article 50 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, l’acte initial de poursuite doit, à peine de nullité, articuler et qualifier le fait incriminé ainsi qu’indiquer les textes dont l’application est demandée. La qualification pénale est donc requise à peine de nullité et toute équivoque quant au fondement de la procédure engagée est contraire à l’article 50.

A ce sujet, la Cour de cassation considère qu'« en matière de diffamation, une plainte avec constitution de partie civile qui omet d'énoncer la qualification exacte des faits dénoncés, et vise de manière approximative un ensemble de textes applicables à des infractions de nature et de gravité différentes, laisse incertaine la base de la poursuite et ne satisfait pas aux exigences de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 » (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 25 juin 2013, 12-84.696, Publié au bulletin).

S'agissant de la troisième plainte, la Cour a également suivie l'argumentation de la défense qui soutenait que la diffamation n'était pas caractérisée car le délit de diffamation suppose l’allégation d’un fait suffisamment précis et déterminé pour faire sans difficulté l’objet d’un débat probatoire, sur le fondement de la jurisprudence habituelle de la Cour de cassation (Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 17 février 1981, 79-92.748, Publié au bulletin ; Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 26 janvier 2016, 14-87.039, Inédit ; Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 24 mai 2016, 15-83.002, Inédit).

La cour d’appel de Paris a pu quant à elle considérer qu’accuser une personne d’être toujours en train de « magouiller, de mentir et de cacher des choses », reproche bien des comportements moralement contestables, mais ils sont insuffisamment précis pour être l’objet d’un débat contradictoire sur la vérité (CA PARIS, Pôle 2, Chambre 7, 25 septembre 2019, RG n°17/15411, cité par BIGOT Christophe, Pratique du droit de la presse, 3ème édition 2021-2022, 321.32).

En l’espèce, les trois parties civiles se plaignaient que le prévenu ait reproduit un message d'une tierce personne leur imputant des « comportements abusifs ». Ces propos sont insuffisamment précis pour faire l’objet d’un débat contradictoire sur la vérité et, partant, l’un des éléments constitutifs de la diffamation fait défaut et le prévenu a été relaxé.

Défendez votre liberté d'expression !

Jean de Bary

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Inapplicabilité des dispositions de l'article 723-15 s'agissant d'un aménagement de peine ab initio

La Cour de cassation a rendu un arrêt intéressant s'agissant des possibilités d'aménager une peine ab initio (c'est-à-dire par la juridiction de jugement et non par le juge de l'application des peines) dans une affaire concernant un client du cabinet. Elle considère que les critères pour aménager une peine soumise à la procédure de l'article 723-15 du code de procédure pénale ne sont pas applicables s'agissent d'un aménagement de peine ab initio sur le fondement de l'article 464-2 du code de procédure pénale. 

 

Le contexte

Il s'agit d'une personne condamnée par le tribunal correctionnel de Nantes le 14 mars 2019 à 18 mois d'emprisonnement avec mandat d'arrêt en raison de son absence. Ayant interjeté appel une fois le mandat d'arrêt exécuté, la cour d'appel de Rennes a confirmé la peine mais en l'aménageant ab initio en détention à domicile sous surveillance électronique avec exécution provisoire.

La chronologie est ici importante car l'audience devant le cour d'appel a eu lieu 24 mars 2021 et le délibéré a été rendu le 21 avril 2021. La décision a été transmise immédiatement au juge de l'application des peines d'Angers où il était incarcéré (en raison de l'exécution provisoire) qui a renvoyé le dossier au parquet général indiquant que la décision était illégale (sans prendre aucune décision, ce qui est à mon avis une erreur de sa part car elle aurait dû rendre une ordonnance). Elle informait alors le parquet que le détenu exécutait une peine de 12 mois depuis le 12 mars 2021, ce que nous ignorions tous au jour de l'audience du 24 mars 2021. Le parquet formait alors un pourvoi en cassation.

Les textes applicables

L'article 464-2 du code de procédure pénale prévoit les modalités d'aménagement de peine par la juridiction de jugement (ab initio).

L'article 723-15 du code de procédure pénale prévoit les modalités d'aménagement de peine d'un condamné libre par le juge de l'application des peines.

La décision de la Cour de cassation

Dans un arrêt du 12 janvier 2022 (pourvoi n°21-82.735), la cour de cassation a décidé que : 

« les dispositions de l'article 723-15 du code de procédure pénale, relatives à la procédure d'aménagement d'une peine d'emprisonnement ferme devant le juge de l'application des peines, lorsque la personne est libre, ne sont pas applicables devant les juridictions correctionnelles qui ordonnent, sur le fondement des dispositions de l'article 464-2 du même code, que l'emprisonnement sera exécuté sous le régime de la détention à domicile sous surveillance électronique, de la semi-liberté ou du placement à l'extérieur, selon des modalités déterminées par le juge de l'application des peines. »

Le parquet général soutenait que la décision d'aménager une peine ferme de 18 mois d'emprisonnement sous le régime de la détention à domicile sous surveillance électronique avec exécution provisoire était illégale dans la mesure où il exécutait une peine de 12 mois.

En effet, l'article 723-15 prévoi que le seuil aménageable tient compte de l'ensemble des peines en cours ou en voie d’exécution.

Ainsi, s'agissant d'un aménagement de peine ab initio, le seuil aménageable devant être pris en compte est uniquement celui de l’affaire examinée par la juridiction en excluant toute autre éventuelle peine en cours ou en voie d’exécution.

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Recevabilité des pièces produites à l’audience de la chambre de l’instruction

La production d’un mémoire devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel est soumise à un formalisme strict de dépôt au greffe au plus tard la veille de l’audience avant l’heure de fermeture du greffe de la juridiction. Qu’en est-il des pièces justificatives ?

Depuis plusieurs mois, le parquet général d’ANGERS a pris l’habitude de soutenir l’irrecevabilité des pièces produites à l’audience si elles ne sont pas communiquées à l’appui d’un mémoire déposé la veille de l’audience au greffe de la juridiction.

Fort heureusement pour les droits de la défense, la cour d’appel n’a pas eu la même analyse de la loi et de la jurisprudence de la cour de cassation, suivant ainsi le point de vue de la défense que nous exercions.

La motivation de l’arrêt n°70 bis du 8 mars 2022 (dossier n°2022/00084), particulièrement intéressante, est la suivante :

«  Aux termes de l'article 198 du code de procédure pénale, les mémoires des parties et de leurs avocats doivent, à peine d'irrecevabilité, être produits, puis communiqués au ministère public et aux autres parties au plus tard la veille de l'audience avant l'heure de fermeture du greffe.

Cette disposition législative, qui ne traite que des mémoires, nom des pièces produites par une partie, doit être interprétée strictement, en ce sens qu'elle apporte une limite à l'exercice des droits de la défense. Les conditions de recevabilité des mémoires ne peuvent alors être étendues aux pièces.

En ce sens, la chambre criminelle traite la question de la production et de la communication des pièces de manière autonome de celle des mémoires.

Ainsi, selon arrêt du 28 mai 1990 (n°89-82.972) rendu dans le cadre d'un contentieux portant sur l'appel d'une ordonnance de règlement, la Cour de cassation s'est référée au « principe de la libre discussion des éléments de preuve, qui domine tout procès pénal » pour admettre la production de pièces à l'audience, en réplique à un mémoire déposé la veille, dès lors que « toutes les parties étant présentes ou représentées à l'audience, ces documents peuvent être contradictoirement discutés ».

Statuant en matière de détention provisoire, la chambre criminelle de la Cour de cassation a, le 12 décembre 2006 (n°06-87.545) décidé de la recevabilité des pièces produites à l'audience par un mis en examen non assisté de son avocat, cassant la décision contraire au motif que le respect des droits du demandeur imposait « aux juges de prendre connaissance de ces pièces après les avoir communiquées au ministère public ».

Dans la mesure où le droit de produire et communiquer à un mémoire appartient tant au mis en examen qu'à son conseil, la situation analysée par la Cour de cassation dans l'arrêt du 12 décembre 2006 est similaire à celle dont la chambre de l'instruction connaît aujourd'hui.

Les pièces communiquées à l'audience du 23 février 2022 par Maître de BARY, conseil de Monsieur X, ont été communiquées au ministère public et au conseil des parties civiles. Elles ont pu être contradictoirement discutées.

En conséquence, nonobstant l'absence de dépôt d'un mémoire, il y a lieu de déclarer recevable les pièces produites à l'audience par le conseil du mis en examen. »

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Remise en liberté du mis en examen incarcéré provisoirement en l'absence de délivrance du permis de communiquer à son avocat

Dans un arrêt du 10 mars 2021, la Cour de cassation a décidé que le refus de délivrer un permis de communiquer à l'avocat du mis en examen incarcéré provisoirement dans l'attente du débat conradictoire devant le juge des libertés et de la détention entache d'irrégularité la décision et ce, quand bien même la personne mise en examen a été assistée avec son accord par un avocat commis d'office qui n'a émis aucune protestation.

Il s'agit d'un arrêt de principe au visa des articles 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et 115 du code de procédure pénale dont la Cour a précisé la portée en décidant que : 

"Le défaut de délivrance du permis de communiquer en temps utile, met en cause la régularité du débat contradictoire et donc celle de l’ordonnance rendue et du titre de détention qui en résulte"

La référence au "temps utile" risque de donner lieu à une jurisprudence intéressante tant en regard de la date de la demande de report, que de la date de la délivrance du permis de communiquer et des modalités d'accès aux établissements pénitentiaires.

Cette décision est dans la droite ligne de la jurisprudence habituelle de la chambre criminelle qui a rendu plusieurs arrêts de principe en la matière, avec une motivation similaire au visa des mêmes textes : 

"Vu les articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, 115 et R. 57-6-5 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en vertu du principe de la libre communication entre la personne mise en examen et son avocat, résultant de l'article 6 paragraphe 3, c, de la Convention européenne des droits de l'homme, la délivrance d'un permis de communiquer entre une personne détenue et son avocat est indispensable à l'exercice des droits de la défense ; qu'il en découle que le défaut de délivrance de cette autorisation à chacun des avocats désignés, avant un débat contradictoire tenu en vue de l'éventuelle prolongation de la détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen ;"

Cette motivation consacre la double mission de l'avocat : défendre et conseiller, la défense ne pouvant pas utilement être préparée en l'absence de délivrance d'un permis de communiquer. Cette exigence apparaît quasi absolue pour la Cour de cassation qui s'est prononcée déjà dans plusieurs cas : 

  1. Lorsque plusieurs avocats sont désignés et que celui habilité à recevoir les convocations a obtenu un permis de communiquer mais qu'un autre avocat régulièrement désigné a sollicité un permis de communiquer quatre jours avant le débat sans l'obtenir (arrêt du 12 décembre 2017) ;
  2. Lorsque l'avocat désigné a présenté une demande délivrance d'un permis de communiquer quarante-huit heure avant le débat (renouvelée plus de vingt-quatre heures avant le débat) et que le permis lui a été délivré moins d'une heure et demi avant celui-ci (arrêt du 9 mai 2019) ;
  3. Lorsque plusieurs avocats sont désignés et que le permis de communiquer demandé a été transmis à la maison d'arrêt mais non à l'avocat qui l'a sollicité, quand bien même un autre des avocats du mis en examen en avait obtenu un auparavant (arrêt du 20 novembre 2019) ;
  4. Lorsque le permis de communiquer à été sollicité deux jours avant le débat et délivré le lendemain du débat (arrêt du 7 janvier 2020) ;

Dans ces décisions toutefois, le mis en examen n'était a priori pas assisté d'un avocat, tandis que dans l'arrêt du 10 mars 2021 le mis en examen a été assisté d'un avocat de permanence et ce, sans émettre de protestation et avec l'accord du mis en examen. La Cour de cassation a toutefois considéré que cela ne régularisait pas la procédure dans la mesure où le fondement de cette jurisprudence est de permettre au mis en examen de préparer sa défense avec son ou ses avocats "en temps utile"

Relevons d'ailleurs a cet égard que pour la Cour il s'agit d'une nullité faisant nécessairement grief, quand bien même d'ailleurs, le juridiction releverait "qu’il n’a pas été porté atteinte aux droits de la défense dès lors que, selon les propres déclarations de M. X..., Maître B... était en possession de tous les documents nécessaires à sa défense et que, lors du débat contradictoire du 18 septembre 2019, aucune écriture n’a été déposée et aucun des avocats choisis ne s’est présenté au cabinet du juge des libertés et de la détention pour prendre connaissance du dossier et s’entretenir confidentiellement avec l’intéressé avant la tenue du débat" (arrêt du 7 janvier 2020).

La Cour apporte peu de limites à cette obligation de délivrer le permis de communiquer en temps utile :

  1. Une circonstance insurmentable empêchant la délivrance du permis de communiquer (quoique la jurisprudence de la Cour n'offre - sauf erreur - pas d'illustration d'une telle circonstance) ;
  2. Le permis de comuniquer n'a pas à être remis mais délivré par le juge, ainsi, il appartient à l'avocat de se déplacer pour le retirer ou bien de solliciter un report du débat, si les délais légaux le permettent (arrêt du 10 mars 2020).
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Remise en liberté du mis en examen en détention provisoire en l'absence de motivation d’un refus de renvoi

Dans un arrêt du 16 mars 2021, la Cour de cassation est venue réaffirmer l'obligation pour le juge de mentionner dans sa décision la demande de report - présentée par le justiciable ou son avocat - et de motiver son refus, dès lors que la demande de renvoi est elle-même motivée.

Cette obligation est lourde de conséquence car s'il s'agit, comme en l'espèce, d'un débat contradictoire devant le juge des libertés et de la détention aux fins d'éventuelle prolongation de la détention provisoire, l'absence de mention et de motivation entraîne la remise en liberté. 

La Cour a d'ailleurs précisé que la chambre de l’instruction, saisie de l’appel de l’ordonnance rendue sur la détention provisoire, ne peut chercher dans le procès-verbal établi à l’occasion du débat contradictoire cette motivation. En clair, la cour d'appel ne peut pas régulariser cette absence de mention et de motivation.

Il s'agit d'un arrêt de principe rendu au visa de l'article 137-3 du code de procédure pénale qui impose l'obligation de motivation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention en matière de placement ou de prolongation de la détention provisoire.

La Cour s'était déjà prononcée récemment en la matière dans un arrêt du 7 octobre 2020 par lequel elle avait considéré que :

"le demandeur ne peut se faire un grief de l’absence de réponse, par le juge des libertés et de la détention, à une demande de renvoi du débat contradictoire, cette demande étant accompagnée d’un seul justificatif illisible, ce qui ne mettait pas en mesure son destinataire d’en apprécier la pertinence, celui-ci devant statuer dans des délais contraints, la chambre de l’instruction a justifié sa décision et n’a méconnu aucun des textes visés au moyen."

Dans cette espèce, la demande de renvoi était présentée par l'avocat du mis en examen qui indiquait être retenu devant une autre juridiction et la chambre de l'instruction avait estimé que l’énoncé du motif de cette demande, peu explicite, ne permettait pas au juge des libertés et de la détention d’estimer concrètement en quoi l’audience à laquelle il était retenu pouvait présenter un caractère prioritaire.

Il convient d'être vigilant quant à la jurisprudence ultérieure de la Cour de cassation car ces arrêts laissent penser que la Cour est plus rigoureuse s'agissant de la motivation si la demande a été présentée par l'avocat du mis en examen que par le mis en examen lui-même. En effet, dans l'arrêt de mars 2021, le mis en examen a demandé un renvoi le jour du débat au motif de l'absence de ses avocats, tandis que dans l'arrêt d'octobre 2020, l'avocat du mis en examen a demandé le renvoi avant le débat car il ne pouvait être présent en raison d'une autre audience. En toute objectivité, la demande de renvoi était mieux motivée (outre le caractère illisible du justificatif) dans le premier arrêt que dans le second et, en tout état de cause, le fondement était le même : l'absence au débat contradictoire de l'avocat du mis en examen.

D'ailleurs, l'arrêt de 2020 - qui n'est qu'un arrêt d'espèce - semblait à rebours de la jurisprudence habituelle de la Cour de cassation qui n'exigeait pas une motivation détaillée dès lors que la demande se fondait sur l'absence d'avocat du prévenu. En effet, suivant un arrêt de principe du 15 juin 2010, la Cour de cassation a décidé que : 

"Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire, alinéa 1, du code de procédure pénale ;
Vu ledit article, ensemble l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que, selon ces textes, toute personne poursuivie, qui ne souhaite pas se défendre elle-même, a droit à l'assistance d'un défenseur de son choix ; que les juges ne peuvent, sans motiver leur décision, refuser le renvoi d'une affaire sollicité par le prévenu en raison de l'absence de l'avocat choisi ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que l'avocat d'Olivier X... a demandé le renvoi de l'affaire par télécopie et par lettre, parvenues avant l'audience, et que la juridiction de proximité a statué par décision contradictoire à signifier à l'égard du prévenu ;
Mais attendu que, le jugement ne mentionnant ni la demande de renvoi ni la décision des juges en réponse à cette demande, la cassation est encourue ;"

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